Retour sur la Journée Vélo & Influence #1
– mardi 15 avril 2025, Hôtel de Roquelaure (ministère des Transports), Paris
Version à télécharger / Version résumée
Organisée pour la toute première fois par Mai à vélo*, avec le concours du ministère des Transports, la Journée Vélo & Influence a réuni une soixantaine de participant(e)s. Animée par Karine Lassus (consultante vélo 360°), cette journée a permis d’assister à différents ateliers de réflexion, table-ronde et cartes blanches – autant de temps favorisant l’expression libre et les échanges.
À l’origine de cette Journée Vélo & Influence, il y a le désir de rassembler une communauté d’acteurs influents sur les réseaux sociaux, pour travailler ensemble et accélérer l’avènement d’une France cyclable.
Nous sommes conscients de l’importance immense des médias et des créateurs de contenu dans la diffusion de messages pour partager à tous les publics, notamment les plus éloignés de la pratique, l’engouement autour du vélo.
L’objectif était donc de créer et fédérer une « communauté vélo » unie, pour partager au plus grand nombre les multiples bienfaits du vélo et remettre le plaisir au centre de la pratique !
Comme le dit Thibault Hardy, chargé de projet au Réseau vélo et marche :
« L’influence, c’est aussi créer les conditions pour que les modes actifs deviennent un automatisme, car bons pour la santé, agréables, économiques, et porteurs d’un environnement plus juste et plus accueillant. »
*Mai à vélo est un évènement national de promotion et d’animation autour du vélo et des mobilités actives. Cette fête qui dure un mois a vocation à ce que le vélo soit utilisé et adopté par le plus grand nombre, partout en France, le reste de l’année. Pour ce faire, Mai à vélo rassemble toutes les initiatives et événements cyclables organisés du 1er au 31 mai sur la carte interactive www.maiavelo.fr.
Le programme de la journée Vélo & Influence
Au programme de la journée, un enchaînement de différents temps comme suit :
- Mot d’accueil par M. Philippe Tabarot, ministre des Transports
- Table-ronde « Regards croisés : parler vélo, quels enjeux ? » et séance questions-réponses. Avec Karine Lassus, Baptiste Lemaître, Claire Pelgrims, Pauline Juvigny et Noémie Kempf
- Session #1 d’ateliers :
- Atelier 1 : « Idéation de contenus » avec Baptiste Lemaître, Les Roues de l’Avenir
- Atelier 2 : « Vélo demain » avec Flavien Lopez, Cerema
- Atelier 3 : « Vélo & parent » avec Olivier Godin, auteur
- Atelier 4 : « Vélo & environnement » avec Elodie Barbier Trauchessec, ADEME
- « Le vélo vu des Pays-Bas » avec Mariëtte Van Empel
- Repas et essai de vélos adaptés vanRaam
- Résultats de l’enquête sur l’usage du vélo par Thierry du Crest, coordonnateur interministériel vélo et marche
- Session cartes blanches – « Le vélo dans tous ses états »
- « Le vélo en milieu rural » par Philomène Le Lay
- « Vélo & handicap » par Caroline Fruchaud
- « Vélo & slow travel » par Charlotte Jammes & Caroline Prigent (Bivouak)
- Session #2 d’ateliers :
- Atelier 5 : « Vélo, train & loisirs » avec Valérie Malinge, Transilien SNCF Voyageurs
- Atelier 6 : « Vélo & innovation » avec Vincent Monatte, Bergmal / et CARA
- Atelier 7 : « La place des femmes dans le vélo » avec Ophélie Laffuge, Beyond my bike / Les Femmes à vélo
- Atelier 8 : « Le vélo, un objet recyclable pas comme les autres » avec Quentin Bellet, Ecologic
- Clôture par Patrick Guinard, trésorier de Mai à Vélo, président de l’APIC et de la filière économique France Vélo
Vous trouverez ici la restitution à télécharger, ici un résumé très condensé des interventions, et ci-dessous une restitution de ces différents temps d’échange et de partage.
Allocution du ministre des Transports
Pour introduire la journée, nous avons eu l’honneur d’être accueilli par M. Philippe Tabarot, ministre des Transports, pour une intervention et un temps d’échange avec la salle.
Après avoir rappelé l’objectif des 12% de part modale vélo d’ici 2030, M. Tabarot est revenu sur l’importance de bien vivre ensemble – à quelques jours de la sortie du rapport d’Emmanuel Barbe « Prévenir les violences et apaiser les tensions pour mieux partager la voie publique », duquel il espère des propositions concrètes. Enfin, il a loué l’investissement des collectivités locales en faveur du vélo : « Bravo aux initiatives des collectivités qui font vivre les plans vélo. L’enveloppe du Fonds vert apporte un complément de financement nécessaire et indispensable […]. La conférence de financement fixera des orientations pour plusieurs années. J’espère que les recettes liées aux autoroutes pourront financer les transports publics et les modes actifs, nous avons besoin de solidarité entre les différents modes de transport ».
Table-ronde : “Regards croisés : parler vélo, quels enjeux ?”
Malgré l’atteinte d’un plateau en 2024, la pratique du vélo poursuit sa progression de fond cette année : d’après le dernier bulletin de fréquentation 2025 du Réseau vélo et marche, la fréquentation cyclable a augmenté de +9 % sur les cinq premiers mois de l’année par rapport à la même période en 2024, avec des hausses particulièrement marquées en avril (+14 %) et mai (+16 %). Cette dynamique est portée à la fois par des conditions météorologiques favorables et par une mobilisation accrue autour d’événements comme Mai à vélo. La croissance est homogène sur tous les territoires : +9 % dans les grands centres urbains, +11 % dans les communes rurales et +7 % dans les zones de densité intermédiaire.
Ces chiffres montrent que la pratique s’ancre durablement, mais ils rappellent aussi que pour aller plus loin, il ne suffira pas d’ajouter des pistes cyclables. Il faudra aussi des récits communs – véhiculés par des communautés, des créateurs de contenu, des influenceurs. Dès lors, faire le choix du vélo, c’est aussi faire le choix d’une certaine vision du monde.
Pour démontrer cela, quatre intervenant(e)s de qualité ont été invité(e)s à prendre la parole sur le sujet lors d’une remarquable table ronde animée par Karine Lassus :
- Pauline Juvigny – spécialisée dans la communication et le marketing appliqués au secteur du vélo et des mobilités.
- Noémie Kempf – autrice, chroniqueuse, podcasteuse et consultante indépendante spécialisée sur les sujets de brand content & storytelling, autrice du livre Le Pouvoir des communautés.
- Baptiste Lemaître – auteur et producteur de documentaires dont Les Roues de l’Avenir, un film qui explore le rôle du vélo comme moteur de transitions dans les villes. Il est aussi co-fondateur de Kajoo.média, un média qui sensibilise à la transition écologique en misant sur un argumentaire inspirant et jamais culpabilisant.
- Claire Pelgrims – chercheuse en Urbanisme et mobilité à l’Université libre de Bruxelles. Sa recherche s’intéresse aux imaginaires de vitesse et de lenteur dans l’évolution des infrastructures de mobilité au XXe siècle.
Ce qu’il faut retenir :
1) Le vélo peut agir comme un moteur narratif et culturel
D’un point de vue historique du développement du vélo, Claire Pelgrims a rappelé le rôle fondamental qu’a joué le vélo – d’abord réservé à la bourgeoisie – dans l’émancipation des femmes et des classes ouvrières. Avec l’arrivée de la voiture, son usage décline pour être relégué à une pratique de loisirs, jusqu’à redevenir dans les années 2000 un formidable outil dans la réduction des inégalités sociales, et pour la portée environnementale.
Du côté de Baptiste Lemaître, c’est à partir du constat que le vélo prend une place prépondérante à Bordeaux, qu’il s’interroge avec son groupe d’étudiants en entreprenariat sur les raisons derrière cette observation. Après deux ans de tournage et d’interviews, le documentaire Les Roues de l’Avenir voit le jour. Le film explore la manière dont le vélo peut devenir un moteur narratif et culturel des transitions en cours : il met en lumière les choix politiques, les initiatives citoyennes et les récits individuels qui façonnent l’essor du vélo. En donnant la parole à des élus, des urbanistes, des associations, des entrepreneurs et des usagers, le documentaire montre que le vélo n’est pas qu’un simple mode de transport : il incarne une nouvelle manière d’habiter la ville et de penser nos mobilités.
Pour Noémie Kempf, spécialiste de la narration de marque et de la création de communautés, il y a une crise de confiance et une fragmentation des sociétés et des identités. Désormais, beaucoup de gens s’informent via les réseaux sociaux ou leurs proches, davantage que via les médias qui ne semblent plus être la principale source d’autorité et d’influence. Dans un monde très polarisé sur l’opinion et l’information, les marques et les institutions en souffrent. Leur enjeu est donc de travailler davantage sur l’incarnation, d’apprendre à créer des ponts et des collaborations avec de « vraies personnes », micros et nano-influenceurs, auxquelles les gens peuvent s’identifier. Selon Noémie, cela dit beaucoup de notre société sur la façon de fédérer. Elle ajoute que les communautés sont au cœur de logiques identitaires, et que le pouvoir des communautés doit être de toute urgence intégré dans les stratégies de communication des acteurs qui veulent amorcer le changement.
Pour compléter sur la notion d’incarnation, Pauline Juvigny cite des exemples de réussite : « Vélotafons ! », communauté de cyclistes du quotidien à Lille avec un taux d’engagement très fort, le blog de Roulez Jeunesse (marque du secteur qui développe une stratégie de contenu type média), ou encore les cafés vélo ou magasins de cycle qui organisent des social rides. L’ancrage communautaire et l’attachement territorial qui montent sont d’ailleurs une composante importante de la communication d’influence.
2) Les arguments pour donner envie, influencer, encourager le changement des mentalités et des comportements
Avant de rentrer dans l’argumentaire, Claire est revenue sur les profils des utilisateurs du vélo du quotidien. Jusqu’alors, les travaux de recherche portaient surtout sur l’infrastructure. Désormais, l’enjeu est de communiquer auprès des publics qui ne pratiquent pas grâce à un travail sur les imaginaires, le plaisir, les représentations, les valeurs sur lesquelles on s’appuie. Elle insiste sur la nécessité de sortir des discours invisibilisants : pour élargir les usages, il faut absolument diversifier les récits et représenter la pluralité des pratiques. L’image dominante du cycliste — souvent blanc, masculin, diplômé — ne reflète pas la réalité des vécus. On ne vit pas tous le vélo de la même manière, et chacun doit pouvoir se reconnaître dans les messages et les campagnes.
Toutes et tous affirment de concert que les arguments écologique, économique ou pratique ne suffisent plus. Pauline a pu le voir dans le cadre de ses missions d’accompagnement d’un public non-initié à se mettre au vélo : elle a dû casser les idées reçues et prouver que des solutions existent avec le VAE, les infrastructures, etc.
Noémie complète en parlant des études sur l’adaptation humaine : un changement pérenne ne peut s’opérer que s’il est associé à des émotions fortes et/ou qui impactent directement. Le changement pérenne dépend aussi de la personne qui porte le propos : on ne se sent pas proche d’un ministère, en revanche il y a un mimétisme, un sentiment d’appartenance à un groupe qui a ses propres codes, via les communautés par exemple qui ont une caisse de résonance forte.
Baptiste renchérit sur la notion des émotions comme un élément déclencheur des bascules : on ne change pas durablement sans plaisir, attachement, émotion. Il faut créer du récit, du lien, du sens ; et donner envie, faire essayer, rassurer, accompagner. Et selon lui, la clé pour y arriver, c’est le « kiff» (c’est-à-dire le plaisir). Parce que les militants sont déjà convaincus, et que tenir un discours militant à des non-initié(e)s peut être contre-productif, on doit faire vivre aux néophytes des émotions fortes et positives associées au vélo. Ce qui convainc aujourd’hui, c’est avant tout l’argument plaisir : le vélo c’est agréable – plus que la voiture, plus que les embouteillages.
3) Décloisonner les usages et les récits
Le monde du vélo est souvent fragmenté : urbain, sportif, cyclotouriste, militant… Parce que le revers de la médaille des communautés c’est justement le risque de cloisonnement (en opposant “nous” contre “eux”) et d’enfermement des normes et des systèmes de pensée, Noémie apporte quelques éléments de réponse : réfléchir à la temporalité, à une cocréation d’événements entre communautés (et pas uniquement des évènements « que » vélo), réfléchir à ce qui nous lie à d’autres communautés et comment créer des ponts, quelle proposition de valeur (common brand) porter pour transcender les divergences…
Les marques du secteur ont d’ailleurs un rôle à jouer dans leur communication car ce sont aussi des acteurs de sensibilisation et de promotion auprès des néophytes. En ce sens, elles devraient davantage collaborer avec des influenceurs / ambassadeurs mais également des usagers. En effet, la question de l’équipement dans la transformation de la pratique est d’ailleurs cruciale, car en s’équipant parfois de façon très stéréotypée – et donc possiblement de manière inadaptée à la pratique – on risque de décourager l’usage.
Sur la notion de divergence, Claire rebondit en rappelant que la forte opposition entre la voiture et le vélo est aussi un enjeu de démocratie, avec un risque de division sociale. La perméabilité (ou imperméabilité) entre les pratiques vacances / loisirs, sport et quotidien se ressent beaucoup. Il devient alors important d’identifier les valeurs communes, de trouver la perméabilité entre les communautés et les pratiques.
Claire évoque aussi l’enjeu d’adopter la stratégie des petits pas, et la possibilité d’agir sur les courts trajets. Ses travaux montrent par ailleurs que l’événement et le voyage sont un puissant levier de changement : faire du vélo en voyage donne envie de répliquer ce comportement au quotidien (on relativise plus facilement les distances par exemple).
Justement, le documentaire Les Roues de l’Avenir de Baptiste montre bien que les petits pas comptent, que le vélo, ce n’est pas « tout ou rien ». On commence par un essai… et on ne s’arrête plus (comme avec Mai à vélo !). Et dans une volonté de concilier le monde du sport et du vélo du quotidien, Baptiste a d’ailleurs porté un partenariat avec ASO pour diffuser Les Roues de l’Avenir sur chaque étape du Tour de France 2025, avec également une diffusion dans les fan-parks de Lille et Montpellier. L’objectif de ce partenariat était justement de toucher les gens à un moment où ils sont dans les conditions mentales confortables et favorables pour découvrir une nouvelle pratique.
Pauline termine avec un exemple pour montrer que le décloisonnement des pratiques et des communautés est essentiel, voire une évidence : Jérôme Sorrel raconte dans son livre qu’il a déjà suggéré la solution du vélotaf à un triathlète qui ne savait pas comment trouver le temps de s’entrainer. Un « imaginaire partagé » est possible.
Pour réussir une communication efficace sur le vélo auprès du grand public, il ne suffit pas d’informer : il faut émouvoir, inspirer et rassembler.
Les communautés — créateurs de contenu, associations, collectifs, ambassadeurs — jouent un rôle clé pour parler aux néophytes et leur transmettre le plaisir associé au vélo.
Parce qu’on ne change pas durablement les comportements sans émotions fortes, nos récits doivent donner envie d’essayer, rassurer, accompagner, et représenter la diversité des pratiques pour que chacun et chacune puissent se sentir légitimes.
Nous avons toutes et tous un rôle à jouer pour construire une culture vélo partagée, d’autant plus quand on dispose d’une communauté qui écoute, s’engage et fait confiance.
ATELIERS DE REFLEXION #1
Atelier 1 : « Idéation de contenus » avec Baptiste Lemaitre
Baptiste Lemaitre s’est appuyé sur son expérience de porte-parole et co-producteur du documentaire Les Roues de l’Avenir pour inciter les participants à réfléchir, en groupe, et de façon très concrète à des idées de communication sur le vélo. Quel format, quel sujet, quel angle, pourraient justement être pris pour aborder le sujet vélo de façon différente, originale et attrayante ? Quel groupe arrivera à proposer le meilleur script pour un post viral sur les réseaux sociaux ?
Au-delà du contenu, la diversité des participantes et participants a rendu les échanges particulièrement intéressants et instructifs, avec de grandes différences de connaissances sur les réseaux sociaux en général et sur les types de contenus viraux aujourd’hui.
Atelier 2 : « Vélo demain » avec Flavien Lopez
Flavien Lopez est chef de projets Aménagements cyclables et espace public au Cerema, établissement public pour l’élaboration, le déploiement et l’évaluation de politiques publiques d’aménagement et de transport. Et voici la question toute simple qu’il a posé aux participant(e)s :
« Demain : plus besoin de parler du vélo, puisqu’il sera un mode de déplacement pour tout le monde… Alors, comment parler vélo aujourd’hui pour ne plus avoir à en parler demain ? »
L’objectif de cet atelier était clair : réfléchir ensemble à la manière de rendre le vélo désirable, logique et contagieux dans nos prises de parole.
Ce qu’il faut en retenir :
1) « Vélo-gique : un réflexe à adopter »
« Demain, plus personne ne prendra sa voiture pour faire 2 kms. »
Une affirmation volontairement clivante, qui a ouvert le débat. Aujourd’hui, 45 % des déplacements quotidiens en France font moins de 3 kms, mais plus de la moitié de ces trajets sont encore réalisés en voiture.
L’échange qui a suivi a permis de se partager quelques clés de communication pour agir :
- Interroger les habitudes: pourquoi persiste-t-on à utiliser la voiture pour ces trajets courts ?
- Montrer l’expérience utilisateur : des formats courts et visuels pour prouver que 2 à 3 kms à vélo, c’est rapide, agréable et possible.
- Changer les normes : donner envie plutôt que culpabiliser, en parlant de confort, de plaisir et de liberté.
2) « Vélo-tonome : l’autonomie dès l’enfance »
« Demain, chaque enfant saura se déplacer à vélo avant de savoir lire. »
En France, la réglementation autorise les enfants à circuler à vélo sur le trottoir jusqu’à 8 ans, mais les pratiques restent très inégales selon les territoires. Si certains établissements ont engagé des démarches proactives, beaucoup restent encore en retrait, faute d’infrastructures adaptées, de sensibilisation ou d’accompagnement.
L’atelier a permis d’explorer plusieurs questions : Pourquoi si peu d’enfants se déplacent-ils encore à vélo ? Comment donner envie d’apprendre aux plus jeunes et leur permettre de devenir autonomes ? Quels formats et leviers privilégier : tutoriels vidéo, récits inspirants, ambassadeurs jeunesse, projets pédagogiques en classe…
Derrière ces échanges, c’est tout l’enjeu de l’écomobilité scolaire qui se dessine. Favoriser la marche et le vélo pour les trajets domicile-école ne peut réussir que si tous les acteurs sont impliqués :
- Les enfants, en leur transmettant les compétences et la confiance nécessaires pour se déplacer seuls et en sécurité.
- Les parents, souvent prescripteurs des choix de mobilité, qu’il faut rassurer et embarquer dans la démarche.
- Les équipes pédagogiques et les établissements, dont l’adhésion est essentielle pour intégrer ces sujets dans les projets éducatifs et les actions de sensibilisation.
L’objectif est clair : inscrire le vélo et la marche dans la culture des mobilités dès le plus jeune âge, au même titre que la lecture ou le sport, et en faire un réflexe partagé par toute la communauté éducative.
3) « Vélo-tomatique : des territoires faits pour pédaler »
« Demain, tous les trajets seront accueillants pour les cyclistes » : le rêve, direz-vous !
Depuis 1996, la loi LAURE (Loi sur l’Air et l’Utilisation Rationnelle de l’Énergie) impose que toute création ou rénovation de voirie en agglomération intègre des aménagements cyclables. Son article 20, codifié à l’article L.228-2 du Code de l’environnement, pose clairement le principe :
« À l’occasion des réalisations ou des rénovations des voies urbaines, à l’exception des autoroutes et voies rapides, doivent être mis au point des itinéraires cyclables pourvus d’aménagements sous forme de pistes, bandes, voies vertes ou marquages au sol, en fonction des besoins et contraintes de la circulation. »
La LAURE ne force pas les collectivités à adopter une politique cyclable globale, mais les oblige à prévoir des aménagements dès lors qu’elles engagent des travaux de voirie. Elle a ainsi jeté les bases des politiques actuelles de développement des mobilités actives.
La loi d’Orientation des Mobilités (LOM), adoptée en 2019, a renforcé et précisé ces obligations :
- elle a clarifié les types d’aménagements possibles (pistes, bandes, voies vertes, zones de rencontre, etc.) ;
- elle a élargi le champ d’application hors agglomération lorsque le besoin est avéré (zones à faibles émissions, proximité d’un PDM, réseau des véloroutes, etc.) ;
- elle a introduit la possibilité, sous conditions, d’autoriser les cyclistes à emprunter une voie en site propre destinée aux transports collectifs lorsque l’espace est insuffisant pour créer un aménagement séparé.
Malgré ce cadre législatif clair, les disparités territoriales restent importantes : si les métropoles ont souvent pris de l’avance, de nombreuses villes moyennes et zones rurales peinent encore à garantir des itinéraires sécurisés et continus.
L’atelier a mis en avant plusieurs pistes d’action :
- Engager les collectivités dans une politique plus ambitieuse de cyclabilité et veiller à la bonne application de la loi.
- Sensibiliser le grand public à la diversité et à la qualité des aménagements, même sans pistes séparées, via des formats pédagogiques et immersifs.
- Créer des récits territoriaux pour montrer que le vélo peut s’adapter à tous les contextes — urbains, périurbains et ruraux — et favoriser une culture partagée des mobilités actives.
En conclusion, Flavien a fait passer 3 messages-clés lors de cet atelier :
- Le vélo est logique pour une grande part des trajets du quotidien
- Il doit s’apprendre tôt et se transmettre dès l’enfance
- Il a besoin d’un environnement accueillant pour devenir un réflexe
L’objectif : continuer à faire du vélo un réflexe — dans nos vies comme dans nos récits !
Atelier 3 : « Vélo & parents » avec Olivier Godin
Olivier Godin est journaliste, auteur (Prends ma roue !, Partir à vélo, Sur le pas de ma porte, Tand’Afrika) et conférencier.
Il a commencé par voyager loin – un an d’itinérance en Amérique du Nord avec un enfant de 10 mois dans la cariole, puis 3 mois en Scandinavie avec deux enfants en bas-âge – pour finalement se rendre compte qu’on pouvait faire du vélo près de chez soi, en famille.
L’objectif de l’atelier était de réfléchir sur les éventuelles barrières qui peuvent freiner les parents à partir en vacances à vélo avec leurs enfants, même petits, et d’apporter des ressources pour créer dès le plus jeune âge un imaginaire de l’aventure à vélo. Et si, pour cela, on commençait par se remémorer nos premiers souvenirs d’enfant sur un vélo ?
Ce qu’il faut retenir de l’atelier :
1) Partager, grâce au voyage à vélo
Dans de très nombreux cas, le vélo est considéré comme un vecteur d’émancipation, un instrument de liberté.
Le plus important dans un voyage à vélo, ce n’est pas la distance qu’on va parcourir, mais l’histoire qu’on va créer en famille, tous ensemble. Olivier nous montre qu’il n’est pas nécessaire de partir loin pour vivre l’aventure et partager de beaux moments en famille. Un simple weekend à vélo autour de chez soi peut suffire à se reconnecter à la cellule familiale, et créer des souvenirs durables.
2) Simplifier l’expérience
Pas besoin d’acheter du matériel excessif, ni de se lancer le défi de l’autonomie complète. Se lancer avec ce qu’on a à la maison, c’est déjà un grand pas. Olivier prône la simplicité, et montre que le vélo familial peut être une aventure accessible à tous, à partir de chez soi ou à quelques kilomètres. Cette simplicité suffit pour se (re)connecter à la nature, et réenchanter son environnement proche.
3) Commencer dès le plus jeune âge, sans prise de tête
Olivier prouve qu’il est possible de voyager à vélo, même avec des enfants en bas âge. Aujourd’hui, plusieurs solutions techniques adaptées existent : la mini selle, les remorques, les systèmes de traction (type « follow me »), ou carrément le tandem semi couché type Pino-Hase, permettent aux plus jeunes de prendre part au voyage, peu importe leur âge.
D’ailleurs, le vélo est une école d’aventure et de liberté. Dès qu’ils sont autonomes pour pédaler, souvent quand ils entrent à l’école, les enfants partent devant !
Le rôle d’ambassadeur apparait ici : les parents incarnent une autre vision du voyage, et la transmettent à leur(s) enfant(s).
4) Rendre les enfants acteurs du voyage
Il n’y a rien de plus précieux que de donner des missions aux enfants selon leurs envies et leurs capacités (planter la tente, charger les bagages, lire une carte ou suivre un jalonnement, trouver un point d’eau…) : de cette façon, ils cessent d’être de simples spectateurs et deviennent des acteurs du voyage à part entière, impliqués activement dans l’aventure.
C’est là qu’interviennent les nouveaux récits et l’importance de scénariser le voyage, de raconter des histoires, et de reconstruire les imaginaires. Cela permet aux enfants de découvrir le monde à leur rythme et de développer leur autonomie tout en s’amusant.
En conclusion, le vélo en famille est une opportunité très simple de vivre une aventure ensemble, de renouer avec l’essentiel et de partager des moments inoubliables.
Et en bonus : donner le goût d’être acteur de ses propres déplacements, c’est aussi dépasser le voyage et se projeter dans les déplacements du quotidien… Pour faire des enfants des cyclistes de demain !
Atelier 4 : « Vélo & environnement » avec Elodie Barbier Trauchessec
Elodie Barbier Trauchessec est intervenue en tant que coordinatrice de l’équipe Mobilités actives, partagées, inclusives et véhicules intermédiaires à l’ADEME (agence de la transition écologique). Elle a entre autres participé à la définition et à la mise en œuvre des Plan vélo 2018 et 2022 en coordonnant le déploiement des programme AVELO, et elle a piloté plusieurs études stratégiques de l’ADEME notamment sur les Services Vélos (2020) ou encore sur la mobilité à vélo des collégiens et lycéens (2022).
Lorsqu’on parle d’environnement, notamment en rapport avec le vélo, nous avons tendance à nous arrêter à la dimention écologique liée aux bienfaits que peut avoir le vélo sur la nature (diminution des émissions de gaz à effet de serre).
Néanmoins, et c’était l’enjeu de cet atelier, la notion d’environnement peut assez largement être étendue à :
- La perception individuelle (santé physique, santé mentale, plaisir, autonomie, liberté) ;
- L’espace extérieur dans lequel je vis ;
- Les personnes avec lesquelles j’interragis (famille, pro, social) ;
- La nature (faune, flore et les éléments – air / eau / roche) ;
- Le contexte politique et économique global (à l’echelle d’une nation, d’une région ou d’une ville).
Ainsi, replacé dans ces différentes situations, on peut dire que le vélo est bon “pour mon environnement”, il est bon “pour moi dans mon environnement” et in fine, il est “bon pour l’environnement”, car le vélo induit d’autres comportements (consommation, voyages, etc.) qui ont un impact plus global.
L’objectif étant de rendre visible ses bienfaits du vélo sur « ces » différents environnements et pour cela, il faut dépasser le discours « militantiste » ou donneur de leçons et plutôt envisager de nouvelle formes ou axes de communication :
- L’humour ;
- Reprendre les formats qui fonctionnent sur d’autres thématiques que le vélo ;
- Inciter les jeunes avec des figures emblématiques ;
- Donner envie d’avoir envie ;
- Faire rêver sur le quotidien à vélo ;
- Recréer du lien entre les agences et les citoyens…
« LE VELO VU DES PAYS BAS »
Changement de perspective avec Mariëtte Van Empel, conseillère en transport et environnement à l’Ambassade du royaume des Pays-Bas. Interviewée par Suzanne Lécroart, adjointe au coordonnateur interministériel vélo et marche.
Saviez-vous qu’il y a plus de vélos que d’habitants aux Pays-Bas ?
Mariëtte nous raconte l’histoire inspirante du vélo aux Pays-Bas, où ce dernier fait partie intégrante du quotidien et de l’identité nationale.
Tout commence en 1974, époque à laquelle les Pays-Bas et Amsterdam sont envahis par la voiture. Deux événements chocs vont opérer un tournant : la mort d’un enfant (mouvement « Stop de Kindermoord ») et une crise pétrolière. Le vélo va alors s’imposer comme un choix naturel. 50 ans plus tard, le pays compte 24 millions de vélos pour 18 millions d’habitants.
Parmi les clés de leur réussite :
- Un récit national qui inscrit l’apprentissage du vélo dès 6 ans… jusqu’à 100 ans (cf. le prix de la « pédale d’or » pour récompenser les seniors !),
- Une infrastructure pensée pour tous les usages et tous les publics, dès la conception (stationnement, lutte contre le vol, gestion des vélos abandonnés),
- Des pistes à haut niveau de service, rouges, visibles et sécurisées,
- Le développement de réseaux express cyclables qui transforment les trajets domicile-travail,
- Un cadre clair, partagé par tous, grâce à des guidelines nationales élaborés par l’équivalent de notre Cerema, la Dutch Cycling Embassy.
Mariëtte Van Empel a conclu avec une analyse claire. La France est à un moment charnière : crise énergétique, post-COVID, urbanisation dense, essor du vélo électrique… le contexte est là. Il ne reste plus qu’à faire des choix aussi ambitieux que cohérents !
Et comme pour illustrer l’identité profondément cyclable des Pays-Bas, nous avons eu la chance de recevoir l’entreprise néerlandaise Van Raam qui conçoit des vélos adaptés pour les personnes en situation de handicap — pour un vélo réellement accessible à toutes et tous. L’ensemble des participants a donc eu l’occasion de tester un certain nombre de vélos mis à disposition.
ENQUETE SUR L’USAGE DU VELO
Thierry du Crest, coordonnateur interministériel vélo et marche, a présenté en avant-première les résultats de l’enquête sur l’usage du vélo, réalisée en 2024 par l’institut CSA.
Les résultats confirment une tendance de fond :
- 35 % des Français utilisent le vélo au moins une fois par mois ;
- En centre-ville, la pratique du vélo progresse plus vite que la fréquentation des transports publics ;
- 44 % des foyers possèdent au moins un vélo, signe que l’équipement ne constitue plus le principal frein.
Au-delà des chiffres, Thierry du Crest a tenu à mettre ces avancées en perspective : l’évolution de la part modale du vélo reste un défi majeur. Faire progresser la pratique à l’échelle d’un pays est un changement profond des comportements, qui nécessite du temps, des politiques publiques ambitieuses et une mobilisation collective.
« Chaque point de part modale gagné est une victoire considérable pour la transition des mobilités. »
SESSION CARTES BLANCHES : LE VELO EN EMOI
Une session courte où la parole a été donnée à 3 intervenantes sur des sujets variés, pour prendre de la perspective.
« Le vélo en milieu rural » par Philomène Le Lay
Philomène Le Lay est artiste, illustratrice, voyageuse à vélo, et freelance en direction artistique. Elle a choisi de parler à l’assemblée de son rapport intime au vélo, depuis sa jeunesse jusqu’à maintenant, et des différences notoires entre les besoins de déplacement en ville et en milieu rural.
Petite, poussée par son père sur le cyclisme sportif, elle tenait en aversion le vélo. Ce n’est que plus tard, dans sa construction de voyageuse nomade, qu’elle a trouvé des avantages au vélo et a parcouru plus de 30 000 kms autour du monde, devenant ainsi une cyclo-artiste itinérante et engagée.
Mais ayant en grandit en ruralité, Philomène sait parfaitement que la mobilité y est compliquée, que les infrastructures cyclables y sont très rares et que le permis de conduire est bien souvent synonyme de survie.
Adepte de la stratégie des petits pas, Philomène a conclu en rappelant que le vélo ne remplace pas la voiture, mais qu’il est une solution de mobilité à part entière qu’il faut continuer à développer. Elle est convaincue qu’il faut plus de porte-paroles pour en parler, pour rendre le vélo SEXY !
« Vélo & handicap » par Caroline Fruchaud
Caroline Fruchaud est entrepreneuse (Hostobox), passionnée de défis sportifs, et engagée pour sensibiliser au handicap et à l’accessibilité. C’est à la suite d’un accident de ski en 2018, qui bouleverse sa vie et la laisse paraplégique, qu’elle se met au vélo : Caroline, en handbike, et sa sœur partent 10 jours sur la Véloscénie entre Versailles et le Mont Saint-Michel.
Avec le temps, elle adapte son équipement, et fait notamment électrifier son vélo. Plus que personne, elle est confrontée au sujet de l’emport des vélos dans le train, et de la prise en compte du format de son vélo dans les applications d’itinéraires.
Véritable modèle de résilience et battante, son principal message est l’inclusivité. Son mantra : ne pas hésiter à dire que c’est possible ! Pour se faire, elle va à la rencontre des personnes, leur fait essayer son vélo, relève des challenges sportifs intenses, et part à l’aventure comme tout le monde.
En somme, parler du handicap dans le vélo ne doit plus être une exception, mais la normalité.
« Slow tourisme : une autre manière de voyager avec le vélo » par BivouaK
Convaincues que l’émotion est le plus puissant moteur de transformation de la société et que l’outdoor est un accélérateur de transition énergétique et de passage à l’action, Caroline Prigent et Charlotte Jammes créent en 2024 BivouaK – une colo itinérante à vélo pour adultes – avec un accent particulier sur les femmes.
Ce que veulent prouver Charlotte et Caroline, c’est qu’un changement de paradigme est possible sur le voyage, grâce à plusieurs leviers :
- Faire du trajet une aventure: en intégrant le trajet dans le voyage, le « slow travel » invite à l’aventure et offre une autre vision du voyage, plus proche, plus consciente. Entre l’ultracyclisme et le voyage à vélo, le bikepacking parle à la « génération covid », qui a besoin de prendre l’air.
- Faire du vélo un moyen d’évasion: en remettant le mouvement au cœur de la mobilité, le vélo joue un rôle central et permet la reconnexion au corps.
- Faire du train un allié bas carbone: pour sortir de la mobilité carbonée et apporter plus d’écologie dans les évènements, les sorties proposées sont toujours accessibles en train !
Pour communiquer sur ces enjeux, pour lesquels le vélo est un prisme idéal, BivouaK adapte le format :
- Un contenu très pratico-pratique sur les réseaux sociaux: équipement, itinéraires/traces, condition physique, où dormir, comment prendre le train avec son vélo…
- Des récits qui inspirent et donnent envie de se lancer via des témoignages sur le blog, un film et même un podcast.
- Et enfin des rencontres et la création d’une communauté, avec l’organisation d’événements bikepacking.
ATELIERS DE REFLEXION #2
Atelier 5 : « Vélo, train & loisirs » avec Transilien SNCF Voyageurs
L’atelier a été animé par Valérie Malinge, responsable du programme vélo-train chez Transilien SNCF Voyageurs (exploitant du réseau de trains de banlieue et de RER en Île-de-France) et Olivia Mulet, chargée d’affaires publiques et RSE pour la Direction de la Ligne C chez Transilien SNCF Voyageurs.
Avant toute chose, il faut rappeler que Transilien SNCF Voyageurs, représenté par Valérie et Olivia, détient le contrat d’exploitation pour l’autorité organisatrice des transports publics d’Île-de-France, Ile-de-France Mobilités, et répond donc aux exigences et décisions fixées par celle-ci.
Conscient que le sujet train & vélo déchaine souvent les passions, SNCF Voyageurs multiplie les rencontres avec les usagers afin de se nourrir des retours, et Transilien parie sur les loisirs pour développer l’usage du vélo à proximité de Paris.
Ce qu’il faut retenir des échanges :
1) Des enjeux d’accessibilité dans les gares et les trains
En gare, l’accessibilité n’est pas toujours évidente quand on voyage avec son vélo ou quand on se déplace en fauteuil. Le parcours client en gare de bout en bout relève de la société SNCF Gares & Connexions.
En ce qui concerne l’emport des vélos dans les trains, le choix stratégique du groupe SNCF se calque sur le modèle des Pays-Bas, avec le développement d’infrastructures de stationnement en gare, et une combinaison parking vélo + offre de vélos en libre-service. C’est une solution qui correspond particulièrement bien aux vélotaffeurs.
Lorsque l’emport de vélos est possible dans un train, il a été évoqué la question de la saisonnalité. En effet, de plus en plus de voyageurs à vélo souhaitent profiter d’un mode de transport décarboné pour partir en vacances sur les véloroutes et voies vertes, et choisissent de prendre le train avec leur vélo. Ainsi, les lignes de train qui longent la Véloscénie, par exemple, sont très fréquentées en haute saison et des wagons vélo sont ajoutés pour pallier l’afflux temporaire.
Pour les trains qui acceptent des vélos démontés, on pourrait imaginer un service de prêt de housse de transport en gare.
Les échanges ont également mené à la question de la réservation des places dans les trains. Deux points ont notamment été relevés :
- Sur l’application de réservation SNCF Connect, il est impossible de réserver une place en fauteuil roulant ET une place vélo.
- Lorsque l’on doit changer son billet de train pour un autre, on perd la place vélo.
On pourrait dès lors imaginer un système de réservation pour les cas exceptionnels, ainsi que prendre en compte la saisonnalité et adapter l’offre de réservation pour l’été (idée d’un benchmark européen sur le sujet)…
2) Vélo & train, un enjeu majeur similaire de communication
Déplacement à vélo et déplacement en train, même combat ! Il s’agit dans les deux cas de transport décarboné, alternatif à la voiture, et même complémentaire.
Transilien s’engage donc pour plus d’intermodalité et déploie – en collaboration avec Ile-de-France Mobilités et Gares & Connexions – une politique vélo (règles d’emport, ateliers d’auto-réparation, stationnement sécurisé en gare…).
Pour le faire savoir, Transilien développe une campagne de communication axée sur les loisirs, autour de :
- Une application gratuite #CPASLOINENTRAIN,
- Balades accompagnées et escapades en groupe, à la découverte de paysages du Grand Paris et d’acteurs locaux,
- Partenariats avec des créateurs de contenu sur le compte Instagram @cpasloinentrain, pour mettre en avant des micro-aventures accessibles en train et des balades nature par exemple.
Et pour répondre aux conflits d’usagers, aux cas particuliers, à la frustration… la communication joue aussi un rôle nécessaire. Les participant(e)s à l’atelier ont d’ailleurs suggéré de :
- Positionner le cycliste dans le narratif comme un voyageur comme les autres, qui est pris en considération au même titre.
- Augmenter la signalétique en gare, physique ou digitale (expérimentation de nudges en cours), comme du stickage sur les quais pour indiquer aux cyclistes où se trouvent les voitures qui acceptent les vélos à bord.
En conclusion, malgré le paradoxe entre le ressenti des cyclistes qui pratiquent l’intermodalité concrètement et la politique cyclable poussée au niveau national, une stratégie de communication axée sur les loisirs et l’écoute de tous les usagers permet d’aller dans le bon sens de la transition.
Atelier 6 : « Vélo & innovation » avec Vincent Monatte
Vincent Monatte est consultant pour Bergmál, bureau de conseil et expertise spécialisé dans l’économie du vélo, ses impacts, l’évaluation des politiques cyclables et l’influence des usages. Vincent est également vice-président du cluster vélo CARA (région Auvergne-Rhône-Alpes).
Dans son atelier, il a d’abord été expliqué les différentes innovations possibles : servicielles (produire du cyclisme), techniques (faciliter l’usage du vélo, et d’usage (répondre à un besoin). Les participant(e)s ont ensuite débroussaillé la notion d’innovation dans le secteur du vélo à partir des 6 grandes branches de la filière vélo.
Peut-on encore innover dans le vélo ? Comment rendre la filière économique française du vélo plus forte ?
Ce qu’il faut en retenir :
- Production (vélos / composants / accessoires, reconditionnement & recyclage, normes & essais, stationnement & mobilier vélo) :
Le concept de « low tech » a été évoqué, par exemple pour garantir une maintenance plus facile dès la conception et la production du vélo, et pour garantir la sécurité et la fiabilité du vélo tout au long de sa durée de vie.
- Aménagement (planification / étude, travaux publics & mise en œuvre, administration) :
Les participant(e)s ont débattu des innovations imaginables, par exemple autour des questions de sécurisation, des jalonnements au sol (cible tourisme) ou couleurs (en milieu urbain), ou encore des aménagements temporaires qui permettraient de tester toutes les nouvelles solutions.
- Distribution (B2B, vente, maintenance & réparation cycle) :
Toutes les innovations autour des VAE et de l’électrification des vélos (cf. Anod, Virvolt, OZO, Annad) apportent une réelle valeur ajoutée pour les utilisateurs pour qui la distance à parcourir n’est plus un frein au vélo ! Pour vendre au plus grand nombre et faire connaitre, il y a un fort enjeu de communication et marketing de la part des marques.
- Services (assurance / financement, exploitations de services vélo, formation & enseignement, culture, santé, communication, numérique, organisations / associations) :
Sur le service vélo, ce que veulent les usagers c’est de pouvoir accéder facilement à un vélo, et un guidage de bout à bout qui comprenne tous les territoires.
Sur l’usage, un accompagnement des entreprises (auprès des DAF, des RH, et sur les sujets de financement, fiscalité…) permettrait de développer le leasing vélo à grande échelle en France, sur le modèle allemand ou belge, et donc de développer l’accès au vélo via les employeurs. La mise en place d’une communication ciblée et positive aura un impact majeur.
Mais comment financer l’innovation, et qui peut ou doit la porter ?
- Tourisme / loisirs (tourisme, accueil & restauration, sports & loisirs) :
Avec plus de 26 000 kilomètres de pistes aménagées, la France ambitionne de devenir la première destination mondiale du cyclotourisme d’ici 2030. Le secteur occasionne des retombées économiques importances et en croissance depuis une dizaine d’années. Alors, comment relever le pari ?
Les participants ont imaginé l’existence de « vrais » itinéraires avec des liens touristiques (innovation technologique), un meilleur accès aux points d’eau et WC, le développement de la location courte durée de matériel de voyage, et la démultiplication d’ateliers vélo le long des itinéraires. D’ailleurs, France Vélo Tourisme compte aujourd’hui 8 500 établissements labellisés Accueil Vélo, et a pour objectif d’atteindre les 20 000 d’ici 2030.
- Transport à vélo (cyclologistique, plateforme repas-courses, transport de personnes, distribution postale) :
Aujourd’hui il existe 27 000 entreprises de logistique, contre 200 entreprises de cyclologistique (cf. Les Boites à Vélo).
Les innovations imaginées pourraient notamment porter sur le développement des entrepôts du dernier kilomètre. Par exemple, en Occitanie, un partenariat permet aux entreprises de cyclologistique d’utiliser les lignes de bus passagers.
Quelques paramètres doivent être creusés, comme le respect de la chaine du froid, et l’aspects réglementaires de l’accès aux villes.
Atelier 7 : « La place des femmes dans le vélo » avec Ophélie Laffuge
En tant que présidente de l’association Les Femmes à vélo, et fondatrice de Beyond My Bike (plateforme dédiée au vélo au féminin), Ophélie Laffuge a animé cet atelier avec le souhait de parler de l’influence – au sens général du terme – donnée par les femmes dans le monde du vélo.
Un atelier qui résonne particulièrement au regard du programme de la journée : 10 des 17 intervenant(e)s étaient des femmes, fait assez rare dans ce secteur pour être souligné.
Ce qu’il faut retenir :
1) La diffusion des messages
Lorsque les femmes prennent la parole, elles influent sur les messages qui sont diffusés, tant sur le fond que sur la forme.
Il a notamment été évoqué la valorisation de la pratique du vélo au quotidien et la pratique du vélo sportif. Mais aussi le sujet de la sécurité : le vélo apparait régulièrement comme un moyen de rentrer chez soi en sécurité, contrairement aux autres modes de transport (bus, métro, tram, à pied, même en VTC).
2) La création de rôles modèles
Tout part du constat partagé d’un manque de représentations féminines dans l’imaginaire commun.
L’influence des femmes dans le milieu du vélo est importante pour toutes les petites filles qui ont besoin d’entendre des histoires et des récits d’héroïnes pour se construire, et pour toutes les femmes qui ont besoin d’être inspirées ou initiées par d’autres femmes qui prennent la parole et qui participent à des évènements.
3) Le rôle des communautés
Les communautés jouent un rôle essentiel dans la création de liens entre les femmes qui se rassemblent autour d’un même sujet, autour de la pratique du vélo.
Les communautés constituent également un environnement favorable pour s’identifier et progresser autour de la pratique (on peut citer par exemple Girls On Wheels à Paris).
4) Le rôle des hommes
En effet, pour que les femmes soient valorisées au même titre que les hommes, il ne faut pas sous-estimer le rôle que ces derniers ont à jouer, notamment en intégrant les femmes dans chacune des étapes ci-dessus.
Il s’agit notamment d’inciter les hommes à faire évoluer la représentation / l’image des femmes dans les différentes communications en modifiant les récits traditionnels réalisés pour les hommes par les hommes.
Et comme le conclut Ophélie sur son retour sur la journée, « donner la parole aux femmes, les positionner comme animatrices d’événement, intervenantes, ou participantes et invitées, c’est transformer un événement. Et c’est donner envie à beaucoup plus de personnes de revenir parce que c’était vraiment bien ! »
Atelier 8 : « Le vélo, un objet recyclable pas comme les autres » avec Ecologic
Quentin Bellet, Robin Ronceray et Alexis Chapron d’Ecologic (éco-organisme spécialisé dans le recyclage des produits usagés ou en fin de vie) étaient présents pour mener avec les participant(e)s une expérience des représentations sociales sur la réparation, le réemploi et le recyclage. Et pourquoi ne pas faire remonter à la R&D les idées qui auront émergées de l’atelier ?
En fil rouge de l’atelier, la notion d’économie circulaire a permis d’aborder le rapport personnel que peut entretenir un usager avec son vélo tout au long de son usage, et de réfléchir à son cycle de vie complet. L’économie circulaire est un modèle de production et de consommation qui consiste à réutiliser, réparer, rénover et recycler les produits et les matériaux existants le plus longtemps possible afin qu’ils conservent leur valeur.
Ainsi, il s’agit de rompre avec le modèle économique traditionnel et linéaire, qui repose sur le principe du « prendre-fabriquer-consommer-jeter », pour se tourner vers un modèle fondé sur de grandes quantités de matériaux et d’énergie bon marché et facilement accessibles.
Ce qu’il faut retenir :
1) Des représentations sociales sur la réparation des vélos
Si l’indice de réparabilité est en cours de déploiement depuis 2021 (démontabilité du produit, disponibilité des conseils d’utilisation et d’entretien, disponibilité et prix des pièces détachées), il n’est pas encore obligatoire pour la catégorie d’objet des vélos.
Cet indice est une mesure de la loi anti-gaspillage, qui doit permettre de réduire les déchets au maximum. En effet, un vélo conçu dès le départ pour être facilement réparable permettra de le faire durer plus longtemps !
NB : pour un indice de durabilité fiable lors de l’achat d’un vélo, le Cyclescore est la référence de la filière cycle.
Il faut noter que pour éviter les réparations trop fréquentes, l’entretien et la maintenance régulière de son vélo assurent sa fiabilité et longévité. Les ateliers d’auto-réparation, ou bien les tutoriels, ont fleuri partout sur le territoire pour permettre aux cyclistes du quotidien d’assurer cet entretien et de mettre les mains dans le cambouis à moindre coût : réparation de chambres à air, réglages de dérailleurs, chaine, freins, etc… Un modèle souvent associatif et solidaire qui offre la possibilité aux usagers d’apprendre les gestes techniques, dans un délai idéal, et un accès aux pièces détachées de seconde main.
2) Des représentations sociales sur le réemploi des vélos
Le réemploi désigne l’opération par laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont utilisés de nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus.
Appliqué au vélo, cela a évoqué aux participant(e)s de l’atelier différentes catégories d’idées :
- L’aspect environnemental, car les filières de réemploi des vélos (tout ou en partie) permettent une préservation des ressources, et un cycle de vie plus durable pour l’objet. Les sites de seconde main (Le Bon Coin, Troc Vélo…) se sont développés pour faciliter les échanges.
- L’aspect social : le réseau associatif, constitué notamment d’acteurs de l’économie sociale et solidaire (ESS), œuvre en faveur de la réduction des déchets tout en développant des actions de prévention et de sensibilisation auprès d’un public de proximité.
- L’aspect économique : un vélo en fin d’usage ne signifie pas forcément sa fin de vie ! Réemployer c’est offrir une opportunité économique à une personne en donnant son vélo à une structure spécialisée (type Emmaüs) pour lui donner une seconde vie.
Enfin, le réemploi permet l’upcycling, ou surcyclage, pour monter un nouveau vélo de toute pièce ou bien créer des objets tout autre (ceinture, décapsuleur, lampe, sculpture…). Quand l’artisanat et l’art sont au service de l’écologie !
3) Des représentations sociales sur le recyclage des vélos
Enfin, les participant(e)s se sont interrogé(e)s sur ce que leur suscitait la notion de recyclage appliqué à l’objet vélo.
Les matériaux les plus fréquemment utilisés pour fabriquer un vélo sont l’acier, l’aluminium, parfois le carbone ou le titane (cadre, guidon, pédales, chaîne, plateau, etc), le caoutchouc (pneus), la mousse ou le gel (selle)… autant de matériaux qui ne sont pas renouvelables pour la plupart, et qui sont extraits très loin d’ici.
Alors lorsqu’un vélo arrive en fin de vie, que faire de toutes ces ressources ?
C’est là que le recyclage des matières premières intervient, pour permettre aux ressources d’être maintenues autant que faire se peut dans le cycle économique et d’être utilisées encore et encore pour recréer de la valeur.
Et avant de jeter son vélo en décharge ou en déchetterie, on peut aussi le donner à un atelier d’(auto)réparation qui récupérera les pièces détachées pour les réutiliser sur un autre vélo ! L’Heureux Cyclage, réseau national d’ateliers vélo participatifs et solidaires et membre du collectif Mai à vélo, est par exemple un acteur local vers qui se tourner.
En conclusion, l’enjeu est bien de faire adopter les bons réflexes en fin de vie ou fin d’usage du vélo : 1) je répare ou je fais réparer, 2) je privilégie le réemploi, 3) je donne à des structures qui pourront recycler les matières qui composent le vélo.
Et dans cet enjeu, la communication joue bien un rôle clé pour que le vélo reste (ou redevienne) un objet « frugal », qui dure au moins 40 ans !
Pour un exemple concret sur le recyclage et réemploi des vélos, direction l’épisode 7 de la tournée des événements Mai à vélo 2025, dans l’atelier ReCycle-Moi à Roubaix.
CONCLUSION
Finalement, nous sommes sortis de cette journée avec une multitude de défis en ligne de mire. Pour faire de la France une « vélo-nation » et fédérer l’opinion publique, il est temps d’élargir les perspectives, de sortir de l’entre-soi du monde du vélo, de diversifier les points de vue, d’apporter un nouveau regard, d’encourager le partage de récits variés, et de remettre le curseur sur l’écoute de TOUS les cyclistes et de leurs besoins.
« Liberté, plaisir et bonheur » : ces trois mots choisis par Patrick Guinard, président de l’APIC et de France Vélo, résument parfaitement l’esprit de cette première Journée Vélo & Influence.
Une journée marquée par la richesse des échanges, la force des récits et la volonté collective d’agir pour donner au vélo toute la place qu’il mérite.
« Le vélo est un moyen de résilience et de sociabilité », a-t-il rappelé, soulignant combien la pratique cyclable porte des enjeux bien plus larges : environnementaux, sociaux, culturels et économiques.
Patrick a également insisté sur le rôle central de Mai à vélo, véritable catalyseur d’une promotion joyeuse et positive du vélo sous toutes ses formes, pour toutes et tous, partout sur le territoire.
Mai à vélo, un mois pour adopter le vélo… et en faire une évidence pour la vie !
Et maintenant, la suite…
La Journée Vélo & Influence n’était qu’un point de départ. Pour continuer à faire grandir la communauté vélo, partager de nouveaux récits et toucher des publics encore plus larges, nous préparons déjà une 2ᵉ édition !
Vous connaissez des créateurs de contenu, des ambassadeurs, des collectifs inspirants ou des projets innovants à mettre en avant ?
Vous souhaitez que nous abordions certains sujets, explorions de nouveaux formats ou fassions dialoguer des univers encore éloignés du vélo ?
Votre contribution compte : envoyez-nous vos idées, vos propositions et vos envies.
Ensemble, faisons de la prochaine Journée Vélo & Influence un accélérateur de récits et un moment fédérateur pour toutes celles et ceux qui portent le vélo au quotidien.
——————————————————-
Ils & elles ont participé à la journée – leurs retours sur les réseaux :
- Marc-Antoine Bouteille-Torre, podcasteur engagé et accélérateur d’impact.
- Thibault Hardy, chargé de projet au Réseau vélo et marche : retour sur l’influence et la culture vélo
- Charlotte Jammes, co-fondatrice de BivouaK bikepacking : carte-blanche BivouaK
- Ophélie Laffuge, fondatrice de Beyond My Bike, présidente des Femmes à vélo, et CMO de SportpowHER : annonce de l’atelier « La place des femmes dans le vélo », et analyse d’un évènement majoritairement féminin à la Journée Vélo & Influence
- Karine Lassus, consultante vélo SYKKLE : retour sur la journée
- Philippe Leclerc, responsable de la filiale Ridy chez Cyclable : retour sur le décloisonnement des usages
- Noémie Kempf, experte en storytelling et communautés :
- Jean-Matthieu Farenc, responsable du Pôle mobilités à la DREAL Normandie
- Salwa El Khoussi, cheffe de projet mobilités actives, Mairie d’Aubervilliers :
- Sandra Jacques, journaliste et créatrice de contenu @roulemapoupoule : article de restitution de la journée
- Ambassade des Pays-Bas en France: retour sur la session « Vu des Pays-Bas »
- Pauline Juvigny, brand & influence strategist : sur l’importance de la communication et des relais d’influence comme levier de promotion du vélo en France
- Thibault Foncelle, account manager chez Van Raam : démonstration de vélos inclusifs
- Steeve Cretiaux, prestataire de services en communication : retour sur la journée
- Isabelle Lesens, autrice du blog Isabelle & le vélo : retour sur la journée
————————————————————-
Rendez-vous en mai pour pédaler et célébrer le vélo tous ensemble !